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Vers le développement durable - ODD 5 : Sortir de la violence basée sur le genre au Maroc

  1. Créé par Elsa MALAFOSSE
  2. Le 27/10/2020
  3. Dans ODD
À l’occasion du 5ème anniversaire des Objectifs de développement durable (ODD), nous partageons des initiatives d’OSC qui contribuent de manière efficace et innovante à la réalisation de ces objectifs. Cette semaine, l’ODD 5 : parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.

Ce 5ème objectif de développement se concentre sur le droit fondamental à la personne, le principe de l’égalité des sexes étant nécessaire à la construction d’une société pacifique et durable. Malgré les progrès engrangés dans ce domaine, de nombreux défis restent à être relevés : changer les lois discriminatoires, améliorer la représentation des femmes en politique, lutter contre les violences basées sur le genre, voici quelques exemples des chantiers à l’horizon 2030. Un ODD que le programme Tamallouk a pris à bras le corps en se focalisant sur une cible bien précise : éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles. 

« Je suis convaincue qu’on ne peut pas réaliser le développement local sans l’implication des deux genres, de celles des hommes et des femmes. On doit vraiment trouver toutes les possibilités pour vivre en paix et construire notre avenir ensemble sur un territoire sans violence. »

Hanane Chniouer, coordinatrice du programme Tamallouk

Le programme Tamallouk, mené par RCN Justice & Démocratie et son partenaire Ain Ghazal, vise à changer les attitudes sociales et judiciaires face aux violences basées (VBG) sur le genre dans la Région de l’Oriental du Maroc. « Suite à notre expérience avec les femmes dans la région – une région très conservatrice », confie Hanane Chniouer, coordinatrice du programme, « nous avons constaté que la source de toute violence est la violence économique. Donc pour parvenir à cette égalité, à cette autonomisation des femmes, automatiquement nous devons travailler aussi sur les violences. On ne peut créer un programme d’égalité sans aussi traiter le problème des violences, ni travailler sur l’autonomisation sans changer les attitudes vis-à-vis des femmes que ce soit au niveau social ou judiciaire. Pour qu’une femme puisse être actrice de sa vie et s’autonomiser, elle doit d’abord sortir du cycle de la violence. »

Un programme multi-acteurs pour engager toute la société vers l’élimination des VBG

Concrètement, ce sont une multitude d’actions destinées à différents publics qui sont menées avec une approche multifocale, pour induire des changements d’attitudes et de pratiques. « Le programme s’adresse à 4 cibles différentes : les femmes tout d’abord. Puis la population locale, sensibilisée par des campagnes, des ateliers. Sensibiliser le grand public est essentiel. » précise Hanane. « En parallèle, il est très important de travailler avec les acteurs judiciaires et également les médias. »

Pour encourager le rejet des violences et aider les victimes à trouver des réponses auprès des services sociaux et judiciaires, le programme organise des groupes de parole entre femmes, des ateliers de communication non-violente avec les hommes, des campagnes de sensibilisations sur le genre dans les écoles, la formation d’animatrices et d’animateurs, un concours vidéo, etc. «  Avec les acteurs sociaux, nous avons mis en place tout un processus d’accompagnement,  avec un circuit d’intervention auprès des femmes victimes de violence, avec la mise en place d’un réseau d’écoute, avec la communication non-violente, et la standardisation des outils. D’autre part, avec les acteurs judiciaires, nous organisons des échanges entre magistrats marocains et leurs homologues belges » précise la coordinatrice du programme. 

Un nombre croissant de femmes se rendent dans les centres d’écoute pour être accompagnées : « Elles osent briser le silence sur la violence. »

Un des impacts de ce programme peut s’observer dans le nombre croissant de femmes qui se rendent dans les centres d’écoute pour être accompagnées : « Elles osent briser le silence sur la violence. Les gens commencent vraiment à oser parler, la violence est rejetée et dénoncée » constate Hanane. Le nombre des femmes victimes de violences qui demandent l’orientation juridique auprès des centres d’écoute est passé de 926 femmes en 2018 à 1164 femmes en 2019, soit un taux d'évolution de 25.7%.

Cet accompagnement sur le terrain sert également à élaborer des rapports d’analyse, un autre moyen de partager les constats et préparer un futur plan de plaidoyers auprès des autorités locales. Les médias comme 4e cible du programme sont également sensibilisés : « Il est aussi important d’impliquer les médias car ils diffusent les représentations des femmes, » ajoute Hanane,  « il s’agit de les sensibiliser à l’approche égalitaire dans le traitement médiatique des différents phénomènes de violence. » 

Une première peine de suivi psychologique dans un jugement pour VBG

« Dans l’échange entre magistrats belges qui a eu lieu en 2018, nous avons découvert l’approche d’accompagnement des auteurs de violence. Cet échange coïncidait aussi avec l’entrée en vigueur de la loi contre les violences à l’égard des femmes. Un des magistrats marocain a été touché par cette expérience. » nous explique la coordinatrice du programme Tamallouk. « Quand lui-même a traité un dossier de ce type un an plus tard, il a commencé à analyser la loi en profondeur, notamment la disposition sur le traitement psychologique du condamné. Et son jugement va faire jurisprudence, c’est une première pour nous : il a prononcé un suivi psychologique du mari violent. » Depuis l’application de la nouvelle loi de lutte contre les VBG, il s’agit d’une première condamnation dans ce sens avec une mise en application de la loi 103.13 et une procédure de responsabilisation des auteurs de violence. Il s’agit d’une véritable avancée dans la lutte contre les violences basées sur le genre au Maroc, notamment sur le risque de récidive. 

Plus d'infos : Page Facebook du programme Tamallouk

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